Cannes : le syllogisme du mépris

Rédaction par Isabelle Germain

Thierry Frémaux répond au texte « A Cannes, les femmes montrent leurs bobines, les hommes, leurs films » par un syllogisme dont la conclusion est : les femmes ne font pas de films de qualité.

Vendredi, un collectif de femmes cinéastes, avec le soutien des activistes de La Barbe, a publié un texte dans Le Monde dénonçant ironiquement ce que nous avions remarqué (ici) : « Les vingt-deux films de la sélection officielle ont été réalisés, heureux hasard, par vingt-deux hommes ». Et de rappeler que ce n’est pas une première. L’invisibilité des femmes est une constante.

Dans sa réponse, le délégué général du festival Thierry Frémaux ne fait pas dans l’originalité. Appréciez le syllogisme : « Je sélectionne des œuvres pour leurs qualités propres. Nous ne serons jamais d’accord pour sélectionner un film qui ne le mérite pas simplement parce qu’il est réalisé par une femme » a-t-il indiqué à l’AFP, manifestement sans rire. Première proposition du syllogisme : le festival de Cannes ne sélectionne que des œuvres de qualité. Deuxième : les œuvres de femmes ne sont pas sélectionnées. Conclusion : les femmes ne font pas d’œuvres de qualité…

Et ce n’est pas tout : « Mais ce n’est pas à Cannes et au mois de mai qu’il faut poser le problème, c’est toute l’année et partout. La cause des femmes doit être défendue bien en amont de Cannes, qui est une conséquence et une illustration de ce qu’est le cinéma. » Ce n’est pas la première fois que la question est soulevée. Il existe des montagnes de textes, livres, mémoires, brûlots d’associations… Qui ont l’impression tenace de crier dans le désert.
L’homme est créateur, la femme est sa créature.

Dans les musées, les femmes sont sur les tableaux, nues et les hommes sont les auteurs. Au théâtre, elles ont rarement les premiers rôles et les auteures et metteures en scène ont du mal à trouver des financements. Dans l’inconscient collectif, l’homme est créateur, la femme est sa créature. Et ceux qui apprécient les œuvres, les financent et les médiatisent, le font inconsciemment ou non à l’aune de ce stéréotype. A force de regarder les films à travers les lunettes de ces stéréotypes, ils ne voient pas la qualité des œuvres des femmes. Cela fait des années que tout cela est dit, les collectifs de femmes n’ont pas attendu le mois de mai pour dénoncer cette mise à l’écart. Mais Thierry Frémaux et beaucoup d’autres dirigeants de manifestations culturelles ne sont pas au courant.
En réponse, CestBeauLePouvoir a réalisé cette vidéo.

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